La cavalerie mongole

Ecrire à propos de la cavalerie mongole équivaut à écrire à propos de l'Armée mongole. Les deux sont équivalents - l'Armée Mongole, qui conquit les empires mongols au XIIIe siècle, était composée exclusivement de cavaliers, et ce fut une des causes principales de son succès. Ce qui eut été un luxe pour les armées d'autres nations fut réalisable pour le peuple nomade, grâce au cheval mongol, élevé en quantités très importantes dans les steppes: un cheval très endurant, résistant au climat et se contentant de peu de nourriture.

Environ 40% d'une armée typique mongole consistait en cavalerie lourde, que nous décrirons plus loin. Le reste consistait en une cavalerie légère très mobile - quoique la cavalerie lourde mongole fusse capable de la suivre et donc de coopérer avec elle. L'analogie moderne est frappante - une armée composée uniquement de troupes mobiles, ancêtre des Panzertruppen, où le choc (chars) et la masse (infanterie montée) sont capables d'opérer à la même vitesse.

Le cavalier lourd mongol

Conçu pour le choc, le cavalier lourd mongol portait une armure complète, généralement de cuir, ou parfois une cotte de maille souvent dérobée à l'ennemi. Il portait un casque assez simple, similaire à celui porté par les Chinois ou les Byzantins. Les chevaux des cavaliers lourds portaient généralement également un armure de cuir. L'arme privilégiée de la cavalerie mongole était la lance, mais chaque cavalier possédait également un cimeterre ou une hache de guerre.

Le cavalier léger mongol

Le cavalier léger, majoritaire, ne portait pas d'armure, si l'on excepte parfois un casque. Ses armes principales était l'arc asiatique, le javelot, le cimeterre, la hache et le lasso. La puissance de l'arc mongol - juste un petit peu plus court que l'arc Anglais qui dévasta l'armée Française à Azincourt - était dévastatrice. Suivant les traditions Scythe et Turque, chaque cavalier léger portait deux ou trois carquois de flèches, et le train de guerre emportait une réserve de flèches et arcs de rechange. De plus, chaque cavalier possédait au moins un cheval de rechange. Ceux-ci étaient assemblés à l'arrière des colonnes, et étaient disponibles pour un changement rapide de monture pendant le déplacement ou même pendant la bataille.

Chaque homme possédait également une chemise de soie qu'il ne mettait qu'avant la bataille. Gengis Khan constata qu'une tête de flèche ne pénétrait que rarement la soie, mais s'enfonçait seulement dans la blessure. Les médecins chinois conscrits dans l'armée de Gengis étaient ainsi capables d'extraire la tête de la flèche en tirant la soie.

Organisation

Les cavaliers mongols, issus d'un peuple de nomades et chasseurs, étaient parfaitement entraînés. Endurants et résistants, les mongols étaient des cavaliers dès l'enfance, élevés dans les dures conditions du désert de Gobi et de la Steppe Sibérienne. Habitués aux climats les plus extrêmes et possédant un physique très solide, ces cavaliers aux habitudes spartiates étaient avantagés pour la guerre.

La cavalerie mongole était également bien organisée, selon une base décimale. L'unité de base comportait 10 hommes (neuf hommes et un chef). Dix unités de ce type formaient un escadron de 100 hommes. 10 escadrons formaient un régiment de 1000 hommes, et dix régiment formaient un tümen (division) de 10 000 hommes. Un corps d'armée comportait souvent trois tümens.

On constatera l'analogie avec un autre système, le système décimal Romain, quoique constitué pour l'infanterie.

Les commandants d'unités étaient choisis pour leur compétence et leur aptitude guerrière. Le commandant exerçait une autorité absolue sur son unité. L'obéissance absolue était donc exigée. La discipline mongole était d'une force inconnue pendant toute l'époque médiévale. On est donc loin de l'image habituelle du combattant mongol indépendant et indiscipliné, si proche de l'image populaire du Hun, qui court dans le folklore occidental.

Nous savons peu de choses du système d'entraînement de Gengis Khan. Nous savons seulement que chaque escadron et chaque régiment était rigoureusement entraîné à exercer les tactiques du système mongol. Quoiqu'il en fut, l'extraordinaire coordination montrée par les tümens sur les champs de Bataille ne pouvait être le résultat que d'intenses préparations préliminaires au cours de manoeuvres préparatoires.

Doctrine et tactiques

La mobilité des troupes de Gengis Khan était bien supérieure à celle des armées à pieds qui leur étaient opposées. Les mongols étaient bien conscients de l'importance de l'obtention de l'initiative dans la bataille, et leurs tactiques étaient offensives - l'attaque, toujours l'attaque, à un âge où un tel credo était adapté à la nature des armes employées.

En début de campagne, les tümens Mongols avançaient habituellement sur un front très large, ne maintenant qu'un contact par courriers entre les différents éléments. Lorsqu'un ennemi était rencontré, le concentration immédiate devenait l'objectif de tous les éléments. Une telle doctrine, avance dispersée suivie par une concentration, peut être rapprochée des tactiques de marche utilisées par Napoléon Ier à une époque plus récente. Une armée trop concentrée ne peut se nourrir sur le terrain, problème amplifié dans le cas d'armées mongoles composées essentiellement de cavalerie, les chevaux étant de très gros consommateurs de fourrage.

Les informations complètes concernant le force ennemie étaient transmises au quartier général, et à leur tour disséminées à toutes les unités.

Gengis Khan évitait une approche stéréotypée de la guerre. Une fois l'ennemi repéré, les Mongols pouvaient l'attaquer par l'arrière, ou sur le flanc. Ou bien encore feindre la retraite, pour soudain se retourner vers l'adversaire avec des chevaux frais. Cet aspect asiatique de la guerre, une guerre où la ruse tient une importance majeure, était un atout face à une cavalerie occidentale qui considérait souvent la ruse avec mépris.

La formation de bataille mongole était généralement composée de cinq lignes, avec de larges intervalles entre elles. La cavalerie lourde composait les deux premières lignes. Les trois autres étaient faites de cavaliers légers. Cette formation de bataille avançait derrière un écran de cavalerie légère chargé de trouver la force ennemie.

Une fois ceci fait, les trois rangs de l'arrière passaient à travers ceux de devant et faisaient pleuvoir sur l'adversaire flèches et javelots.

Cette préparation était souvent suffisante pour faire capituler la plupart des ennemis. Dans le cas contraire, un signal était donné par le commandant du tümen. La cavalerie légère se retirait et la cavalerie lourde chargeait.

Les signaux étaient donnés par des drapeaux blancs et noirs, sous la direction du commandant d'escadron ou de régiment. Ceci évitait les confusions causées de tous temps par des ordres mal écrits (il y avait peu de commandants mongols sachant écrire ou lire de toute façon). La nuit ou par mauvaise visibilité, les mongols employaient des flèches enflammées.

Sièges mongols

Contrairement aux huns, les mongols ne furent pas tenus en échec par leur incapacité à prendre les villes. Dans leurs premières campagnes, les mongols furent souvent frustrés par les murs des villes chinoises. Après une intense étude, et l'adoption des armes et techniques chinoises, Gengis développa en quelques années un système d'assaut des fortifications qui s'avéra presque irrésistible. Gengis Khan enrôla les meilleurs artificiers chinois et assembla un train de siège imposant et mobile, comprenant des engins de jet transportés dans des wagons et par des animaux de bât. Gengis Khan se constitua rapidement un corps de sapeurs chinois au moins aussi efficace que les corps de siège de César et d'Alexandre.

La terreur, pratiquée de façon systématique, fut la seconde arme qui permit à Gengis et à son subordonné Subotai de prendre presque toutes les villes, parfois sans combats. Si les habitants d'une ville résistaient au Khan, le train de siège créait une brèche dans ses murs, et la population était systématiquement massacrée. La réputation des mongols provoquait généralement la reddition des villes lorsqu'une victoire était remportée en campagne. Dans de tels cas, les habitants étaient généralement traités avec moins de sévérité. Cette stratégie de terreur, pas nouvelle puisque pratiquée de tous temps, par les grecs comme par les romains, fut portée à son paroxysme par les mongols. De nombreuses cités furent également prises par la vitesse. La cavalerie légère mongole investissait parfois une ville avant même que ses habitants fussent prévenus de leur approche.

Les Mongols purent résoudre le problème de l'occupation des immenses territoires conquis... en ne les occupant pas. Ils massacraient toute la population, ne laissant " ni un chat ni un chien ". Les prisonniers étaient enrôlés dans l'armée mongole et envoyés à l'assaut des nouvelles fortifications rencontrées. Les prisonniers coopéraient, assurés d'une mort immédiate s'ils ne se battaient pas. Peu survivaient.

Les Mongols épargnèrent la ville d'Herat. Mais à peine furent-ils partis que les habitants se révoltèrent et tuèrent le gouverneur mongol. Critique de la décision qui avait été prise d'épargner cette ville, Gengis Khan ordonna au commandant de son armée d'y retourner et de les châtier. Ceci fut fait. Une inspection finale compta quarante survivants. Ainsi, par une politique de terreur, les mongols conquirent des nations guerrières que nul n'avait pu dominer. Ils brûlèrent Moscou en en 1238, ils écrasèrent la cavalerie lourde polonaise, incapable de s'opposer à la cavalerie légère mongole.

Le Pape et le Saint Empire voulurent mobiliser l'Europe contre cette invasion. Mais les mongols disparurent aussi vite qu'ils étaient arrivés. La mort du grand Khan arrêta une campagne de victoires ininterrompues de quatre ans, et les envahisseurs retournèrent vers l'est, chargés du butin qu'ils avaient gagné. L'Occident fut peut-être également sauvé par ses montagnes et ses forêts. Incapables de trouver en Europe de l'Ouest les larges pâturages nécessaires à la nourriture de leur nombre énorme de chevaux, les Mongols ne franchirent pas les Alpes.

Zarovitch